Communauté
Fête de la Science #FDSSUD
(Voyage)² - Étape 7 : des êtres vivants hors du milieu marin
Vers l'étape précédente : déploiement des formes de vie visibles
Km 0 sur 15,7 : Formation de la Terre (4 500 Ma)
Km 2,5 sur 15,7 : Premiers êtres vivants (3 800 Ma)
Km 3,5 sur 15,7 : LUCA, la photosynthèse (3 500 Ma)
Km 8,5 sur 15,7 : eucaryotes et organismes pluricellulaires (2 100 millions d'années)
Km 10,5 sur 15,7 : la reproduction sexuée (1 500 millions d'années)
Km 13.8 sur 15,7 : déploiement des formes de vie visibles à l’œil nu (environ 540 Ma)
Km 14,3 sur 15,7 : des écosystèmes sur la terre ferme (environ 430 Ma pour les plus anciens vertébrés terrestres)
L'histoire du vivant a débuté il y a plus de 3 milliards d'années. Au cours de cette période, la biodiversité et les écosystèmes, désormais très complexes, sont exclusivement marins. Mais le vivant n'est pas avare d'expériences nouvelles. Et des opportunités se présentent à ceux qui voudraient tenter l'aventure terrestre.
Organismes et écosystèmes marins "à l'étroit"
Avec la diversification des formes vivantes, ce sont aussi les liens entre espèces qui se complexifient, à travers notamment le déploiement des prédateurs, des chaînes alimentaires de prédation et finalement des réseaux trophiques.
Comme vu à l'étape 3, c'est aussi à cette période que la couche d'ozone se met en place autour du globe. Protégeant les organismes vivants des radiations solaires, cette fine couche de gaz atmosphérique autorise désormais les êtres vivants à s'adapter à la vie en surface des eaux marines, puis sur les milieux de battement des marées.
Une succession d'événements
Les amphibiens (grenouilles, crapauds, tritons, salamandres pour les actuels) sont souvent cités comme les premiers êtres-vivants à s'adapter aux milieux continentaux.
A bien y réfléchir, qu'irait donc faire un animal dans un milieu stérile, à tout le moins pauvre en nourriture. Certes poussés hors de l'eau par des prédateurs de toute sorte, c'est bien l'abondance de nourriture sur la terre ferme qui permet la survie d'animaux, d'abord de petite taille car survivants avec de faibles quantité d'énergie, dans ces nouveaux milieux naturels.
Ainsi, bien avant les amphibiens, microbes et champignons, dont les traces fossiles restent rares, préparent le terrain... d'abord aux végétaux. La dégradation des roches génère un sol permettant aux plantes de survivre et de s'installer définitivement en milieu terrestre. Ensuite seulement les animaux, et d'abord des arthropodes, précurseurs de nos insectes et autres araignées ou scorpions actuels.
Vertébrés terrestres
Les plantes et les arthropodes bénéficient donc d'une période d'entre soi au cours de laquelle ils peuvent s’épanouir (relativement) tranquillement. Le Carbonifère (- 360 Ma à - 300 Ma) témoigne de cette richesse végétale, les forêts se dégraderont en futurs gisements de charbon et pétrole.
Et l'image d’Épinal du poisson évoluant en grenouille d'être à nouveau écornée : il semble que les tétrapodes, vertébrés munis de 4 membres, émergent (par voie d'évolution) nettement avant leur émergence (sortie des eaux au sens premier du terme) !
Certains parleraient volontiers d'exaptation. De même que les plumes ont émergé chez certains dinosaures pour lesquels le vol, même plané, tient du fantasme absolu ; la tétrapodie n'émerge donc pas "pour" marcher sur terre. L'histoire évolutive de certains vertébrés passe par la transformation des nageoires en "4 membres" pour une autre fonction que la marche sur la terre ferme. Mais quand vient, plus tard, l'opportunité de coloniser la terre ferme, posséder 4 membres améliore les chances de survie des espèces de vertébrés porteuses, notamment pour lutter contre la gravité. Il en sera de même pour les plumes, organe dont la fonction initiale est encore soumise à hypothèses. La plume sera plus tard détournée au profit du vol plané puis battu chez certains animaux porteurs et leurs descendants.
Enfin, les plus anciens vertébrés terrestres semblent être des animaux d'assez grosse taille : point de nourriture suffisante sur la terre ferme pour leur alimentation. Ces premiers amphibiens restent donc dépendants des eaux à double titre : reproduction ET nourriture. En effet, les amphibiens pondent tous dans l'eau, où leurs œufs peuvent croître et se transformer en têtards.
Plus tard, des amphibiens de plus petite taille seront en mesure d'explorer le monde terrestre en se contentant des arthropodes terrestres pour survivre. Ils sont les précurseurs de tous les vertébrés amniotes, définitivement affranchis des milieux aqueux, y compris pour leur reproduction (voir tortues ou crocodiles actuels pondant dans le sable).
En guise de conclusion, la sortie des eaux : un non événement ?
Comme vu à l'étape 1, parler de "sortie des eaux", c'est également porter un regard anthropocentré sur la biodiversité actuelle et son histoire évolutive. Il serait en effet plus pertinent de parler de "sorties des eaux".
Mais surtout, pour un grand nombre d'espèces actuelles, la sortie des eaux est un non événement : du point de vue du barracuda, cher au chansonnier électrique du siècle dernier et nostalgique d'Alexandrie, la sortie des eaux concerne des espèces bien éloignées et bien peu intéressantes en terme d'histoire évolutive barracudacentrée. Et que diraient l'oursin, ou le poulpe...
Quand au dauphin ou la baleine, la sortie des eaux n'a de valeur pour eux que pour la suite de leur histoire : le retour à l'eau... Etape terminale majeure pour les cétacés, sommets de la biodiversité actuelle, comme me le rappelait hier soir encore mon dauphin domestique à l'heure du bain !
Pour en découvrir plus / sources :
- Les premiers écosystèmes terrestres, Pierre Guériau et Jorge Mondejar-Fernandez , Paléontologues, Muséum national d’Histoire naturelle, Paris dans l'Encyclopédie de l'Environnement
- Guide critique de l'évolution, ss dir. Guillaume Lecointre, éd. Belin - 2009
- Le pouce du panda, les grandes énigmes de l'évolution, Stephen Jay Gould, éd. Grasset, 1982
Retrouvez